Elle

Ma très chère marraine,

Depuis toujours, tu fais partie de mon paysage affectif, aussi loin que ma mémoire puisse m'emporter, tu as toujours été et tu es toujours là.
Depuis longtemps, très longtemps, je souhaite te dire tout mon amour pour toi, tout ce qu'à mes yeux tu représentes.
Je ne l'ai pas fait par paresse, par pudeur, par souffrance, par négligence ou sans raison valable. Il est grand temps de le faire.
Ce jour pour toi marque une étape qui je l'imagine ne laisse pas indemne, j'y pense depuis un moment et je n'ai pas d'autre soutien à t'apporter que celui des mots de cette lettre.
Te souviens-tu de mon nounours, Néné ?
Te dire combien j'y tiens... c'est impossible. Il est toujours là, j'espère qu'il me suivra le jour du départ.
C'est mon premier souvenir de toi et à mes yeux il est toi.
Avec cette fichue mémoire, je me souviens des joies de te rencontrer quand tu venais chez les parents ou quand on venait te voir.
Avec cette même mémoire, je revis les déchirements quand il fallait te quitter.
Je me souviens de ta visible à la clinique pour mon appendicite.
Je me souviens du pot de colle que j'étais au mariage de ta sœur.
Je me souviens des heures passées à te coiffer et de ta patience dans ces moments là.
Je me souviens de nos batailles aux coupe-papiers à B-C.
Je me souviens des séances de cinéma à Paris.
Je me souviens de mon apprentissage sur la glace accroché à ton bras.
Je me souviens de m'être jurer de maîtriser l'anglais parce que tu parlais anglais.
J'ai choisi l'allemand en seconde langue, on se demande bien pourquoi.
Je me souviens du musée Guimet, de partager cela avec toi m'avait rendu presque malade d'émotion.
Je me souviens de tant de choses.
Parmi elles il en est une qui me pèse depuis des dizaines d'années et je dois m'en expliquer.
J'avais reçu de toi une carte du Canada d'un chef indien, la fameuse carte.
Dans ma tête de gamin, j'étais tellement heureux de recevoir cette carte que je m'imaginais que de recevoir la même te rendrait aussi heureuse que je pouvais l'être... forcément ce fut une magistrale boulette ! Ce qu'on peut être bête. Je n'avais pas compris pourquoi c'était devenu toute une histoire et quand j'ai "enfin" compris, j'avais tellement honte que je n'ai jamais osé expliquer ce geste.
Je me souviens aussi de ta présence insoupçonnée un jour à Chalivoy avec tonton, tata, papy et mamy, quand il s'était agit de dire au revoir à la maison.
Ma seule idée était de t'offrir quelque chose. Ce quelque chose ce fut un bouquet de coucous cueilli en hâte près de la mare au bout du terrain.
C'est certainement depuis ce jour que ce sont mes fleurs préférées.
Je ne sais pas d'où vient cette affection, cet amour que j'éprouve pour toi, mais il est, et le simple fait qu'il existe me suffit comme justification.
Il y a plein de questions que je ne te poserai jamais mais qui me hantent souvent.
Je ne veux pas de réponses, mais d'évoquer ta solitude, tes départs... tout cela m'attriste, mais bon, comme on dit banalement : c'est la vie !
Alors que pourtant tu n'es pas banale.
Il est des choses que je sais, que je sens que nous partageons et dont je n'arrive pas à te parler, c'est ainsi.
Au travers de ces souvenirs, de ces phrases, de ces mots, c'est tout mon amour pour toi que je voudrai exprimer.
Comme c'est difficile de dire je t'aime à quelqu'un.
C'est à croire qu'on ne nous apprend pas à aimer.
Il faut trouver le ton, le moment, l'envie, le courage et puis le faire.
Alors je me lance, même si les mots me semblent plats, sans relief, sans couleur, sans bonheur, sans joie, sans émotion. Il ne sont que des mots.
J'espère juste qu'ils sauront te répéter le plus fidèlement possible ce que je ressens :

Je t'aime tant, tellement, si fort, si intensément !

Je ne peux que te souhaiter un très très heureux anniversaire.
Smab se joindrait à moi sans réserve s'il savait cette lettre (s'il la signe c'est qu'il saura).

Dominique

(au fait, Smab aussi a signé)

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